vendredi 28 juin 2013

Interview : Laurence Romance


1991. Encore. The Year That Music Broke. Enfin pour moi, à chacun sa date... KLF, NTM, Nirvana, Sonic Youth et le documentaire The Year That Punk Broke - Public Enemy, De la Soul, Digital Undergound, et à la TV, il y a Métal Express : 30 min de clip dans les univers métalliques soutenu au départ par une simple voix off. Puis une jeune femme au corset noir et aux cheveux rouges s'insère dans notre petit écran : notre Marilyn Punk nous est apparue.

De 1993 à 1997, Laurence Romance et Nick Kent (co-réalisateurs), élargissent le concept  de l'émission au rock indépendant et la renomment "Rock Express". Ça sera pour nous l'occasion de nous initier à une autre musique que celle du Multitop de Laurent Petitguillaume...

De son côté Laurence écrit pour Best, LibérationJalouse, Les Inrockuptibles - une série sur les raves party émergentes -, le magazine Rolling Stones, et traduit de nombreux ouvrages. En 1996, elle met en place la collection X-Trême chez Austral avec au départ quatre livres : celui de Nick Kent, baptisé en vf "l'Envers du Rock" (The Dark Stuff) ; la première bio officielle de Nirvana (approuvé par Cobain de son vivant) Nirvana, L'Ultime Biographie de Michael Azzerad ; un ouvrage sur l'internet ; et enfin le "Generation X" des années grunge : "Prozac nation : Avoir vingt ans dans la dépression" une autobiographie d'Elizabeth Wurzel qui sera adaptée en film avec Christina Ricci dans le rôle principal.

A partir de 2000, Laurence traduit Le journal de Kurt Cobain, signe la préface du roman de Hubert Selby Junior - Waiting Period, écrit deux chapitres de Goth: le romantisme noir de Baudelaire à Marilyn Manson (ouvrage collectif présenté par Patrick Eudeline), s'insert dans le livre collectif Rock Critics, et joue dans le court métrage de Marcia Romano, Quand j'étais Gothique (2011) aux cotés de Roxane Mesquida.

Trêve de présentation, il est maintenant temps de vérifier si l’originale est, comme le suggère Borges, infidèle à ses traductions :

1. Votre 1er souvenir musical ?
Les chants avinés des clients du bar de mes parents dans le Pas-de-Calais, ça compte ?

2. Le meilleur disque que l’on vous ait offert ? Le pire ?
Meilleur : Led Zeppelin IV quand j’étais petite. Le pire : il y en a vraiment trop…

3. Le 1er livre que vous ayez perdu ?
Quatre pas dans les champs. C’étaient les aventures de Murinette et Gros-Raton, une souris et un rat trop mignons … J’étais inconsolable.

4. Quelle rencontre a changé votre vie ?
Celle de mon fils, il y a vingt ans. Depuis, James, aka Perturbator, aka The Lord of Dark Synth ou James Carpenter pour les aficionados, ne cesse de m’étonner.

5. A quoi ressemblera la musique dans 50 ans ? dans 5000 ans ?
Who knows ? Et surtout : who cares ?

6. Quel album ignoré ouvrira un nouveau genre musical ?
Ce serait top si c’étaient ceux de Perturbator ! (eh oui, je ne rate pas une occase de faire la pub de mon fiston chéri)

7. Yann Kerninon dans Vers une libération amoureuse propose de réinventer l’amour. Si ce projet venait à aboutir, quel serait pour vous l’hymne de cette révolution ?
Dream On par Aerosmith

8. Le disque dont vous avez peur ?
Delìrium Còrdia de Fantômas, l’un des groupes de Mike Patton (Faith No More). C’est un concept-album sur la chirurgie sans anesthésie.

9. Est-ce que la traduction est une imagination dépendante ?
Joli, mais je préfère « l’original est infidèle à la traduction » de Borges, plus flatteur pour le traducteur, cet éternel homme de l’ombre. Ou femme parfois.

10. Baudelaire : « Savez-vous pourquoi j’ai si patiemment traduit Edgar Poe ? Parce qu’il me ressemblait. » Et vous, pourquoi avez-vous si patiemment traduit Kurt Cobain ?
Parce que je n’avais pas bien mesuré la tannée qui m’attendait quand j’ai signé le contrat ! Pour commencer, je ne m’attendais pas à ce que le « Journal » soit manuscrit…

Sinon, sur Baudelaire : il s’est bien gardé de dire qu’il n’a traduit de Poe que ce qui les faisait se ressembler…

11. Le film qui vous donne envie d’écrire ?
Aucun, je n’aime pas spécialement l’acte d’écrire, éventuellement le résultat.

12. Après le Summer of Love en 68, le Summer of rave en 88, quel genre d’été peut on encore espérer ?
Euh, le « Summer of Hate » ? Ah non, y’a eu déjà, avec le punk… Je donne ma langue au chat.

13. Votre meilleure interview pour Rock Express ? La pire ?
En télé, les pires sont souvent les meilleures : David Lee Roth qui nous sermonne, l’équipe et moi–même, sur le mode instit’ « bon, maintenant vous m’écoutez attentivement », Tricky qui me traite d’idiote et arrête net l’interview, les black métalleux norvégiens de Mayhem qui veulent nous casser la figure… Suffit ensuite de démarrer le sujet par « l’incident » : effet anti-zapping garanti !

14. Le morceau méconnu que tout le monde devrait connaître ?
J’hésite entre Paintwork de The Fall et Tu peins ton visage, la reprise de Warpaint, par Vic Laurens et les Vautours, hein, pas la version des Chats Sauvages. Que des histoires de peinture, par des mecs qui n’hésitent pas à en rajouter une couche.

15. L’album que vous n’aimeriez pas être ?
Delìrium Còrdia de Fantômas.

16. Quel auteur rêvez-vous d’inclure dans votre collection X-Trême pour Denoel?
En fait, j’avais crée X-Trême chez un autre éditeur qui a mis la clef sous la porte [Austral, ndlr], et Olivier Rubinstein m’a piqué le nom pour Denoel… Mais tout est pardonné, car il a publié depuis Le dernier verre par le Dr Ameisen, le découvreur du baclofène. Un best-seller et un livre d’utilité publique, ça m’aurait convenu.

17. “Imaginez que vous vous réveillez demain, et que la musique n’existe plus. Il n’y a plus aucun instrument, aucune trace d’enregistrement sur terre. » Que ferez vous ? 
Comme il me resterait la mémoire de la musique, et que le ryhtme, le beat, est à la base de tout, je commencerais par bidouiller une batterie avec les moyens du bord.

18. L’album idéal pour écrire ?
Malheureusement, je ne peux pas écrire en écoutant de la musique.

19. Avez-vous déjà eu des hallucinations auditives ?
Des quoi ? Ah oui, ça m’est arrivé, ce genre de trucs. A jeun en plus.

20. Comment aimeriez-vous mourir ?
Rapidement.


pix : Laurence Romance © Renaud Monfourny

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire